samedi 5 juillet 2025

Sainte Zoé de Rome

 Sainte Zoé de Rome

Peinture représentant Saint Zoé, du XVIIIème siècle



🙏 1. Une noble romaine dans l'empire des idoles : jeunesse de Zoé sous Dioclétien

Vers la fin du IIIe siècle, dans la Rome impériale bercée d’or et de sang, vivait une femme appelée Zoé, noble matrone promise à une destinée fastueuse. Son nom, Zoé, vient du grec, qui signifie « vie » et c’est bien une vie nouvelle, surnaturelle, qu’elle allait recevoir, lorsque le Verbe ferait irruption dans son silence. Épouse de Nicostrate, haut dignitaire au service du gouvernement, elle habitait les riches quartiers de la Ville éternelle, au plus près du pouvoir. La tradition rapporte qu’il exerçait les fonctions de fonctionnaire impérial chargé de la logistique des travaux publics, peut-être comme sculpteur ou inspecteur des constructions, et qu’il avait l’oreille des puissants.

Zoé, quant à elle, était connue pour sa dignité, sa beauté grave, mais surtout pour le mutisme douloureux qui l’affligeait depuis plusieurs années. Les sources anciennes affirment qu’elle était frappée d’une perte totale de la parole, inexpliquée par les médecins de l’époque. Ce silence forcé lui valait la pitié ou la crainte, dans une société où la parole était à la fois instrument de sociabilité et de statut.

Dans cette Rome qui semblait encore triomphante, mais qui cachait sous ses marbres les fissures d’un monde à l’agonie, Dioclétien régnait avec la main de fer du réformateur absolutiste. Il avait imposé la Tétrarchie, tenté de stabiliser l’économie par des édits drastiques, et surtout, il s’était érigé en divinité vivante, exigeant de tous, y compris des élites,qu’ils sacrifiassent aux autels de l’empereur. Le refus de ce culte n’était pas seulement impie : il était un crime politique, un acte de sécession morale. Dans cette atmosphère tendue, les chrétiens étaient déjà traqués, bien que la persécution officielle ne fût pas encore déclenchée (elle commencera en 303).

Zoé, encore païenne, menait donc sa vie sous le regard des dieux muets de Rome, au cœur d’un monde qui étouffait les âmes sous le poids des rites mécaniques et des convenances sociales. Elle ne connaissait pas encore le Christ, ni même son nom. Mais, par le silence de sa langue, peut-être Dieu préparait-il en elle un espace plus vaste, un sanctuaire où, bientôt, une parole toute divine allait faire irruption, non pas en mots humains, mais par miracle...


Vitrail représentant Sainte Zoé

💖 2. Le silence rompu : rencontre avec saint Sébastien et conversion de Zoé

C’était sous le règne de Dioclétien, vers l’an 286 ou peu après, que le centurion saint Sébastien, déjà connu pour son zèle discret et ses consolations aux chrétiens emprisonnés, commença à visiter ceux que la foi exposait à la mort. Il ne parlait pas comme les autres soldats. Dans le palais même, où les complots et les dénonciations faisaient rage, il marchait avec calme, avec douceur, et dans ses yeux brûlait une lumière que Rome ne connaissait plus. Il était, selon saint Ambroise, « soldat du Christ sous l’armure de César ».

C’est à cette époque qu’il croisa Zoé, toujours muette, toujours captive de son corps. Selon la tradition, Zoé vit saint Sébastien prier auprès du tombeau de Saint Pierre, et s’approcha de lui dans un geste d’humilité : elle se jeta à ses pieds, leva les bras au ciel, et tenta de supplier. Mais aucun son ne sortait de sa bouche. 

Alors, saint Sébastien traça sur elle le signe de la Croix, et pria à voix haute en invoquant Jésus-Christ comme seul Seigneur vivant. Et voici que, devant la foule stupéfaite, Zoé retrouva l’usage de la parole, après six années entières de mutisme. Sa première parole fut un cri de foi : « Béni soit le Dieu des chrétiens ! »

Ce miracle bouleversa l’assemblée. Zoé, tombée à genoux, demanda aussitôt le baptême, se convertit publiquement et fut instruite dans la foi par Sébastien lui-même. Son époux, Nicostrate, témoin du prodige, fut également touché en son cœur, et se convertit à son tour quelques jours plus tard, avec toute sa maison. Les sources rapportent que dix-huit personnes furent ainsi baptisées grâce au témoignage de Zoé.

Le silence de ses années passées devint un écho puissant de la grâce. Celle qui n’avait pu parler au monde païen devenait désormais témoin du Verbe. Elle n’était plus la noble femme décorative du palais impérial, mais une chrétienne ardente, marchant vers le martyre avec une foi neuve, trempée dans le feu de la Croix.

Tableau représentant le martyr de Saint Sébastien


🙏 3. L’encens du martyre : supplice et mort de sainte Zoé

Peu de temps après sa conversion, Zoé devint l’une des plus ferventes disciples de saint Sébastien. Elle visitait les prisonniers, apportait du pain et du réconfort aux martyrs dans l’attente de leur jugement, et répandait partout la bonne nouvelle du Christ vivant. Elle n’était plus l’épouse muette d’un haut fonctionnaire, mais une messagère intrépide, le verbe enflammé de celle que Dieu avait touchée.

Mais Rome, cette mégère vêtue de pourpre, ne pardonnait pas qu'on choisît un autre Seigneur que César. La dénonciation fut rapide. Les conversions successives, notamment celle de Nicostrate et de ses serviteurs, ne passèrent pas inaperçues. Zoé fut arrêtée, interrogée, menacée, sommée d’offrir de l’encens aux idoles de l’empereur. Elle refusa.

Alors, selon les récits anciens, les juges ordonnèrent qu’elle fût attachée à un arbre par les cheveux, suspendue en l’air, et qu’on allumât sous ses pieds une fumigation d’encens païen, afin que, bon gré mal gré, elle "sacrifiât" aux dieux par la fumée montant vers eux. Ce supplice, cruel et symbolique, visait à faire d’elle un instrument de souillure rituelle.

Mais Zoé, d'après la Légende Dorée de Jacques de Voragine, les bras liés, le visage tourné vers le ciel, répéta dans la langue retrouvée par miracle : « Mon encens s’élève vers le Dieu vivant, et non vers vos idoles de pierre ! »
La fumée entra dans ses poumons. Elle suffoqua, chanta encore, puis rendit son âme dans la prière, le souffle consumé. Son corps fut jeté dans le Tibre par les soldats, selon l’usage réservé aux martyrs. La tradition affirme qu’il fut repêché par des chrétiens et enterré secrètement dans une crypte du cimetière de l’Appia, non loin du tombeau de saint Sébastien.

Ainsi mourut Zoé, dont le nom signifie "la Vie", consumée par un monde de mort, mais entrée dans la Vie éternelle par le martyre, le 5 juillet 286 à Rome. Son souvenir fut vénéré dès les premiers siècles, et son nom inscrit au martyrologe romain à la date du 5 juillet.

Vitrail représentant le martyr de Sainte Zoé


⛪ 4. Héritage et vénération de sainte Zoé

Le souvenir de sainte Zoé ne s’éteignit pas avec la dispersion de ses restes. Dès les premiers siècles, son nom fut inscrit dans les diptyques liturgiques, aux côtés des martyrs de la persécution de Dioclétien. Son culte se développa d’abord localement à Rome, où elle fut associée à saint Sébastien et aux martyrs du cimetière de l’Appia. La crypte où elle fut inhumée devint un lieu de pèlerinage, aujourd’hui effacée par les siècles mais mentionnée dans plusieurs itinéraires de pèlerins.

Son nom passa ensuite en Orient, où la forme grecque Ζωή (Zoé) éveilla une grande ferveur mystique. On la retrouve honorée dans plusieurs Ménologes byzantins, et même dans le Synaxaire constantinopolitain. Des icônes la représentent parfois auprès de saint Sébastien, comme sa disciple et sa sœur d’âme, toutes deux soldats du Christ, l’un dans les armes, l’autre dans la parole retrouvée.

Au Moyen Âge, elle fut invoquée par les femmes mariées et les muets, comme patronne de la parole retrouvée et de la foi conjugale sanctifiée. Elle figure dans certaines litanies des martyres romains, en particulier dans les régions influencées par la liturgie romaine ancienne.

Aujourd’hui encore, l’Église la fête le 5 juillet, et sa mémoire reste une figure de lumière dans l’Église persécutée, symbole de celles qui, du silence imposé, passent à la proclamation ardente.

Ce que nous devons retenir de Sainte Zoé de Rome est de rester dans l'Espérance, même dans les moments les plus difficiles de notre vie. Sainte Zoé qui fut muette, retrouva la voie grâce à Dieu.

Icône de Sainte Zoé de Rome


♱ Prière à Sainte Zoé


Ô glorieuse Sainte Zoé,
Toi qui as vécu avec courage et fidélité pour le Christ,
nous nous tournons vers toi avec confiance.

Aide-nous à proclamer notre foi avec la même force
et à rester inébranlables face aux épreuves de la vie.

Intercède auprès du Seigneur pour tous ceux qui souffrent,
particulièrement ceux qui peinent à exprimer leur voix
ou qui vivent dans le silence du mutisme.

Obtiens-nous la grâce d’une foi vive,
un amour profond pour Dieu,
et la force d’affronter les persécutions avec dignité.

Sainte Zoé, toi qui as été un exemple de foi jusqu’au martyre,
prie pour nous et garde-nous sous ta protection.
Amen.

(Source dans le site des "Saints guérisseurs").

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